ALLOCUTION D’OUVERTURE PAR LE PRESIDENT DE LA COUR,HONORABLE JUGE GERARD NIYUNGEKO
ALGER, ALGÉRIE, 26-27 JUILLET 2012
Excellence Monsieur le Ministre, représentant le Gouvernement algérien,
Honorable Présidente de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples,
Honorables Juges de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples,
Honorables Vice-présidente et Membres de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples,
Mesdames et Messieurs,
1. Je suis honoré de prendre la parole à l’occasion de la cérémonie d’ouverture de la première rencontre annuelle entre la Cour et la Commission africaines des droits de l’homme et des peuples.
2. Je voudrais donc saisir cette occasion pour exprimer d’abord la gratitude de la Cour au Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, pour avoir accepté d’accueillir cette rencontre, et pour toutes les facilités qu’il a généreusement accordées à la délégation de la Cour, depuis son arrivée dans la capitale algérienne. Cet accueil témoigne du soutien du Gouvernement algérien à l’ endroit des institutions panafricaines de protection et de promotion des droits de l’homme. En ce qui concerne la Cour africaine, il importe de rappeler que l’Algérie a non seulement ratifié le Protocole portant sa création, mais qu’il a dès l’origine fait élire un de ses nationaux, comme Juge à la Cour, j’ai nommé notre distingué Collègue Juge Fatsah Ouguergouz. Nous ne doutons pas que dans un avenir proche, le Gouvernement algérien considérera aussi la possibilité de souscrire à la déclaration spéciale de reconnaissance de la compétence de la Cour pour recevoir des requêtes émanant des particuliers, permettant ainsi à ses citoyens de saisir la Cour, après bien entendu épuisement ou tentative d’épuisement des voies de recours internes.
3. Qu’il me soit ensuite permis de remercier la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples pour avoir accepté de prendre la responsabilité d’organiser cette rencontre de bout en bout, et la féliciter pour y avoir réussi.
4. Je voudrais en outre remercier le Directeur du Centre Africain d’Etudes et de Recherche sur le Terrorisme qui a accepté d’abriter cette réunion, ainsi d’ailleurs que la réunion des Bureaux de la Cour et de la Commission qui l’a précédée, il y a deux jours. Cette institution sœur de l’Union africaine a tout fait pour que nous nous sentions chez nous, à l’Union africaine, ici a Alger.
5. Je souhaiterais par ailleurs saluer le travail accompli par les Bureaux des deux institutions au cours de leur première réunion tenue à Lilongwe, Malawi, en mars 2011, et de leur deuxième réunion tenue ici même à Alger, il y a deux jours. Ce travail va certainement aider la Cour et la Commission réunies ici en session plénière, à traiter de manière fructueuse toutes les questions inscrites à l’ordre du jour de la présente rencontre.
6. Je voudrais enfin remercier tous les Juges, tous les Commissaires pour leur présence à cette importante rencontre, et en même temps reconnaître le travail important abattu par le Greffe de la Cour et le Secrétariat de la Commission, dans la préparation, aussi bien de cette rencontre que de la réunion des Bureaux qui l’a immédiatement précédée.
Excellences, Mesdames et Messieurs,
7. La décision d’institutionnaliser des rencontres régulières entre la Cour et la Commission africaines des droits de l’homme et des peuples a été prise par les deux instances à l’occasion des diverses réunions qu’elles ont tenues entre elles à Arusha et à Dakar entre juillet 2009 et avril 2010, en vue d’harmoniser leurs Règlements intérieurs respectifs. L’idée a par la suite été formellement consacrée par ces mêmes Règlements.
Il est donc heureux qu’aujourd’hui, cette décision et cette idée se concrétisent par la tenue de la toute première rencontre statutaire annuelle entre la Cour et la Commission.
8. Il convient de rappeler que la Cour et la Commission sont appelées par le Protocole portant création de la Cour à travailler dans une relation de complémentarité en matière de protection des droits de l’homme. A cet égard, le Protocole prévoit d’une part que la Commission peut saisir la Cour d’allégations de violations des droits de l’homme, et d’autre part que la Cour peut solliciter l’avis de la Commission sur la recevabilité des requêtes qui lui sont soumises, et qu’elle peut même carrément renvoyer des requêtes devant la Commission.
Excellences, Mesdames et Messieurs,
9. Il me plaît d’indiquer à cette place qu’avant même la tenue de cette première rencontre, la Cour et la Commission se sont déjà effectivement engagées dans cette relation de complémentarité. À cet égard, Il y a d’abord lieu de noter que la Commission a saisi la Cour de deux affaires, et que la Cour a renvoyé quatre affaires devant la Commission. Par ailleurs, la Cour a été invitée, et a participé à toutes les sessions publiques de la Commission depuis novembre 2010, y compris les forums des ONG organisés en marge des sessions de la Commission. De son coté, la Commission a participé à certaines activités de promotion de la Cour, en particulier à la Conférence continentale sur la promotion de la Cour organisée par celle-ci en mars 2011, à Lilongwe. Enfin, la Cour a envoyé un membre du personnel du Greffe appuyer le secrétariat de la Commission au cours d’une session de celle- ci, posant ainsi un premier pas en rapport avec un programme d’échange du personnel qu’il y aura lieu d’affiner.
Excellences, Mesdames et Messieurs,
10. L’objectif de la présente rencontre devrait donc être d’évaluer les timides pas franchis par les deux institutions dans la voie de leur collaboration institutionnelle, d’identifier les lacunes et les problèmes existants, et de trouver les voies et moyens les plus appropriées pour rendre cette relation de complémentarité le plus fluide et le plus intense possible, en vue d’une protection plus étendue et plus efficace des droits de l’homme sur le continent.
11. Pour la Cour, cette première rencontre est d’une importance stratégique capitale dans la mesure en particulier où elle sera une occasion pour les deux institutions de clarifier ensemble certaines questions qui, si elles n’étaient pas résolues, pourraient constituer des obstacles à la saisine de la Cour par la Commission, ou au renvoi des affaires par la Cour à la Commission. J’ai notamment à l’esprit ici la question de l’interprétation du principe de non- rétroactivité du Règlement intérieur de la Commission et de son impact sur la saisine de la Cour, ainsi que la question du renvoi des affaires à la Commission par la Cour, alors même que celle-ci n’a pas compétence pour les traiter.
12. Par rapport à la complémentarité des deux institutions, cette rencontre est également d’une grande importance pour la Cour dans la mesure où elle sera aussi l’occasion, plus globalement, d’examiner de nouvelles stratégies à mettre en œuvre afin que la Cour soit saisie d’un plus grand nombre d’affaires, de manière à lui permettre de produire un impact plus important qu’aujourd’hui sur la protection des droits de l’homme à l’échelle continentale.
13. Enfin, cette rencontre est aussi importante pour la Cour, parce qu’elle permettra d’examiner de nouvelles stratégies conjointes de promotion de la Cour à travers le continent, et de développer des programmes d’échanges de personnels, d’information et de documents entre les deux institutions.
Excellences, Mesdames et Messieurs,
14. Je suis convaincu que les préoccupations et les espoirs que je viens d’exprimer sont partagés par la Commission et qu’en conséquence nous allons tout mettre en œuvre pour que les présentes assises soient couronnées de succès. Je ne doute pas non plus que comme par le passé, nos discussions seront franches et fructueuses, et se dérouleront dans un esprit d’ouverture, de manière à faciliter le développement d’une relation symbiotique et constructive dans notre cheminement commun vers une meilleure protection des droits de l’homme en Afrique.
Je vous remercie pour votre aimable attention.