Son Excellence Monsieur le Premier Ministre, Aïmene Benabderrahmane,
Honorable Juge Modibo Sacko, Vice-président de la Cour,
Mesdames et Messieurs les honorables Juges, Membres de la Cour,
Messieurs les Greffier et Greffier adjoint,
Mesdames et Messieurs les membres du personnel du Greffe,
Chers collègues.
Je voudrai avant tout vous dire ma satisfaction de nous retrouver ici, dans cette magnifique ville d’Alger, pour la tenue de la soixante et onzième session ordinaire de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples. Au nom de mes collègues Juges, de l’ensemble du personnel de la Cour et en mon nom propre, je tiens à exprimer ma sincère gratitude au Président de la République algérienne démocratique et populaire, Son Excellence Abdelmadjid Tebboune, personnellement représenté ici par Son Excellence Aïmene Benabderrahmane, Premier ministre, ainsi qu’à son gouvernement, pour avoir accepté d’accueillir non seulement cette soixante onzième session ordinaire de la Cour, mais aussi le sixième Dialogue judiciaire de l’Union africaine.
Son Excellence Monsieur le Premier ministre, Honorables Juges et chers collègues,
Comme nous le savons tous, la Cour africaine est le principal organe judiciaire de l’Union africaine chargé de la protection des droits de l’homme sur le continent. Elle a vu le jour en vertu du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples portant création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (le Protocole de la Cour), afin de compléter le mandat de protection de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, un organe quasi judiciaire de l’Union africaine chargé de la protection des droits de l’homme. À ce jour, sur les 55 États membres de l’Union africaine, 34 seulement ont ratifié le Protocole, dont l’Algérie. Sur les 34 États parties, seuls 8 ont déposé la déclaration en vertu de l’article 34 (6) permettant aux individus et aux ONG de saisir directement la Cour. Ces huit États sont : le Burkina Faso, la Gambie, le Ghana, la Guinée-Bissau, le Mali, le Malawi, le Niger et la Tunisie. Comme on peut le constater, l’Algérie ne compte pas parmi ces 8 États.
Son Excellence Monsieur le Premier ministre, Mesdames et Messieurs les honorables Juges et chers collègues,
L’Algérie fait partie des 32 pays africains fondateurs de l’Organisation de l’Unité Africaine en 1963, et le succès de l’Organisation devait reposer sur les principes de liberté, d’égalité, de justice, de paix et de dignité qui sont essentiels à la réalisation des aspirations légitimes des peuples africains. Le combat de l’une des plus grandes figures africaines, véritable fils du continent, Son Excellence Ahmed Ben Bella, premier président de ce pays, a été l’incarnation de ces valeurs. Selon ce valeureux homme d’État : « La lutte pour la justice et l’égalité n’est jamais facile, mais elle est nécessaire pour un avenir meilleur ». C’est cet avenir meilleur qui résume son combat permanent pour l’indépendance et la lutte pour les droits fondamentaux de l’homme. Cette affirmation souligne s’il en était encore besoin que la réalisation de la justice et de l’égalité exige des efforts considérables, de la détermination et de la résilience. En défendant activement les idéaux de justice et d’égalité, nous jetons les bases d’une société dans laquelle chaque individu peut s’épanouir et contribuer à la réalisation de son plein potentiel.
Cinquante ans après l’OUA, en 2013, ces « aspirations légitimes » exprimées par les pères fondateurs ont été réaffirmées et fermement ancrées dans le nouveau plan directeur pour l’Afrique, à savoir l’Agenda 2063. Le rêve de Son Excellence Ben Bella d’un « avenir meilleur » est donc toujours d’actualité.
L’Agenda 2063 résume ce rêve, aujourd’hui pleinement exprimé par le peuple africain en 7 « aspirations légitimes » clés – des aspirations qui, si elles sont pleinement réalisées, conduiront à « une Afrique intégrée, prospère et en paix, gérée par ses propres citoyens et représentant une force dynamique dans l’arène internationale » – c’est-à-dire l’Afrique que nous voulons.
Excellences,
Ben Bella n’est certes plus parmi nous, mais lui, et bien d’autres de sa génération nous ont légué un continent au potentiel inépuisable. Ce potentiel ne peut cependant être exploité et réalisé que dans le cadre d’un continent intégré, uni, pacifique et prospère, reposant sur des bases solides de bonne gouvernance, d’État de droit et de respect des droits de l’homme. Il convient de relever que les objectifs de l’Union africaine et les aspirations de l’Agenda 2063 se rejoignent sur un dénominateur commun : les droits de l’homme. Aucun de ces objectifs ou aspirations ne peut être atteint sans une base solide en matière de droits de l’homme. Notre prospérité, notre unité, notre intégration, notre développement, notre sécurité, notre paix et notre position sur la scène internationale sont tous liés à notre approche des droits de l’homme.
Excellences,
Compte tenu de la corrélation intrinsèque entre les droits de l’homme, l’intégration, la paix et le développement, le rôle des organismes de défense des droits de l’homme, et en particulier de la Cour africaine dans notre cas, s’avère extrêmement important. L’histoire nous enseigne qu’un système judiciaire indépendant est indispensable au développement socio-économique et politique de toute communauté.
L’aspiration 3 de l’Agenda 2063 est cruciale pour la réalisation des objectifs de l’Union africaine et de l’Agenda 2063. Pour ce faire, les États membres de l’Union africaine devront s’acquitter de leurs obligations internationales en matière de droits de l’homme, y compris la ratification des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, l’adoption de ces instruments, le dépôt de la déclaration prévue à l’article 34 (6), le respect des arrêts et recommandations des organes chargés des droits de l’homme et toute autre forme de soutien nécessaire pour assurer le fonctionnement efficace des organes de protection des droits de l’homme.
Son Excellence Monsieur le Premier ministre, Mesdames et Messieurs les honorables Juges et chers collègues,
L’Algérie est l’un des premiers pays à avoir signé le Protocole en 1999. Elle l’a ensuite ratifié en 2003. La première réunion annuelle entre la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples et la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, après l’harmonisation de leurs règlements intérieurs respectifs, a eu lieu ici même à Alger en juillet 2012. Lorsque la Cour a décidé de se doter d’un système de gestion électronique des affaires, l’Algérie a été l’un des pays qu’elle a visités dans le cadre de son étude comparative.
Au niveau de l’UA, l’Algérie a beaucoup soutenu les institutions des droits de l’homme de l’Union africaine, y compris la Cour africaine, afin de garantir qu’elles fonctionnent sans ingérence extérieure. En outre, l’Algérie est l’un des rares États membres de l’Union africaine dont les ressortissants siègent simultanément dans les trois organes de l’Union africaine chargés des droits de l’homme. Cela démontre son engagement en faveur non seulement des droits de l’homme, mais aussi d’un système judiciaire fort, indépendant et résilient sur le continent. Permettez-moi de profiter de cette tribune pour encourager l’Algérie à couronner ce magnifique accomplissement en procédant au dépôt de la déclaration en vertu de l’article 34 (6), et ce, nous l’espérons, avant la fin de la présente session de la Cour. Il s’agira là d’un merveilleux cadeau que la Cour pourra ramener à Arusha.
Excellences,
Comme je l’ai indiqué précédemment, l’Algérie accueille deux événements très importants pour la Cour : la soixante et onzième session ordinaire et le sixième Dialogue judiciaire de l’Union africaine. Ce dernier événement, qui se déroulera du 20 au 22 novembre, réunira des juges venus des quatre coins du continent, afin d’échanger sur les voies et moyens d’améliorer la protection des droits de l’homme en général et l’efficacité de l’administration de la justice, en intégrant la jurisprudence régionale et internationale en matière de droits de l’homme au niveau interne. Nous osons croire que ce jamboree judiciaire africain biennal sera l’occasion d’un échange fructueux d’expériences et de bonnes pratiques, et qu’il permettra de trouver des solutions pour améliorer la protection des droits de l’homme sur le continent.
Son Excellence Monsieur le Premier ministre, Honorables Juges et chers collègues,
Au cours de cette session, et immédiatement après cette cérémonie solennelle, la Cour rendra 9 arrêts. Elle procédera à l’examen de 13 affaires inscrites à son rôle pour la session.
Nous examinerons également, entre autres, une proposition sur la finalisation des affaires pour 2024, le projet de lignes directrices sur les audiences de mise en état, le projet de manuel sur les procédures devant la Cour, les rapports sur les visites de sensibilisation au Mozambique, à Sao Tomé-et-Principe et au Cap-Vert, ainsi qu’un certain nombre d’autres questions administratives.
Je suis convaincue qu’avec tous les moyens mis à notre disposition par le gouvernement et le dévouement habituel des Juges ainsi que du personnel de la Cour, nous nous acquitterons, comme à l’accoutumée, de notre mandat au mieux de nos capacités.
Son Excellence Monsieur le Premier ministre, Honorables Juges et chers collègues,
Qu’il me soit permis de saisir cette opportunité pour remercier sincèrement tous les membres du personnel du Greffe, les consultants indépendants, le personnel d’appui technique mis à disposition par le gouvernement et tous ceux qui ont contribué de près ou de loin à la préparation des activités de la Cour. Nous comptons sur votre soutien et vos sacrifices pour faire de ces événements un retentissant succès.
J’aimerai conclure mon intervention en remerciant de tout cœur et sans être exhaustif ma sœur, Mme l’honorable Juge Bensaoula, l’ambassadeur d’Algérie en Tanzanie, l’ambassadeur d’Algérie en Éthiopie, le ministre algérien de la Justice, le ministère des Affaires étrangères et leurs équipes, ainsi que tous les membres du gouvernement qui ont contribué d’une manière ou d’une autre à l’excellente coopération que nous avons pu établir tout au long de la préparation de ces activités.
Excellences, Honorables Juges et chers collègues,
C’est à présent pour moi un honneur et un plaisir singuliers de déclarer officiellement ouverte la soixante-et-onzième session ordinaire de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, et de vous souhaiter à tous de fructueuses délibérations.
Vive la République algérienne démocratique et populaire
Vive la Cour africaine
Vive l’Union africaine
Vive l’Afrique
Je vous remercie.
IMANI DAUD ABOUD